De moins en moins de bûcherons

D N A Samedi 24 juillet 2010

De moins en moins de bûcherons

Depuis plusieurs années, le nombre de bûcherons communaux est en baisse dans le Val d’Argent, pour des raisons économiques. Les communes font appel à des entreprises privées ou se regroupent pour exploiter leur forêt. Le point, à la veille de la fête du bois.

Dans les années 1990, la commune de Sainte-Marie-aux-Mines employait 10 bûcherons pour exploiter ses 2 880 ha de forêt communale, la plus grande d’Alsace. Aujourd’hui, ils ne sont plus que six. En 2004, les communes de Lièpvre et Rombach, qui n’avaient plus qu’un ou deux bûcherons chacune, ont décidé de créer un syndicat intercommunal à vocation unique (SIVU) forestier pour mettre en commun leurs salariés. Au sein du SIVU, chaque commune paye une cotisation au prorata des travaux réalisés dans sa forêt.

« En 2002, l’Office nationale des forêts (ONF) a décidé qu’il n’encadrerait plus les travaux dans les communes qu’à partir de quatre bûcherons, indique Agnès Henrichs, maire de Sainte-Croix-aux-Mines et présidente du SIVU. Il s’agissait de pousser les communes à mutualiser la main d’œuvre pour éviter qu’elles ne s’épuisent financièrement. Il y a aussi les consignes de sécurité qui prévoient qu’il faut trois personnes minimum sur un chantier d’exploitation et même sur ceux de sylviculture, si on utilise des engins à moteur ». Pour des raisons économiques, Sainte-Croix-aux-Mines a elle aussi adhéré au SIVU en 2006 même si elle avait encore quatre bûcherons à l’époque – il a fallu trouver une autre affectation à l’un d’eux, le SIVU n’acceptant que trois bûcherons supplémentaires.

« Nous sommes tributaires du marché. Nous devons être vigilants sur le budget »

La baisse du nombre de bûcherons a avant tout des causes économiques. Car si les bûcherons ne font plus certains travaux (comme l’écorçage des troncs), le secteur s’est peu mécanisé : vu les pentes, il n’y a pas d’abatteuse dans la vallée.

Depuis la tempête de 1999, les communes ont souvent enchaîné les déficits avec leur forêt. « Nous sommes tributaires du marché. Nous devons donc être vigilants sur le budget », explique Claude Abel, maire de Sainte-Marie-aux-Mines. Dans ce contexte, alors que les communes payent des frais aux bûcherons pour l’essence, l’huile et l’usure de leur tronçonneuse, même le passage à une huile biologique, plus chère, a eu un coût significatif pour les communes, indique Agnès Henrichs.

De plus en plus, des entreprises privées interviennent dans les forêts communales. C’est d’abord le cas pour le débardage, puisque ni la commune de Sainte-Marie-aux-Mines ni le SIVU ne disposent du matériel nécessaire. Tous deux font aussi appel à des bûcherons privés de manière ponctuelle pour faire face à un surcroît de travail ou à un manque de main d’œuvre.

A Sainte-Croix-aux-Mines, 10 % du travail d’exploitation du bois façonné est confié à des entreprises privées. La commune a aussi choisi de faire exploiter tout le bois vendu sur pied par le privé. Le maire y voit l’occasion de faire travailler des entreprises locale. De son côté, Sainte-Marie-aux-Mines va aussi tester un partenariat pour la fabrication de bois de chauffage par des bûcherons qui ont monté une micro-entreprise.

Des négociations pour fusionner avec le SIVU de Ribeauvillé

D’autre part, depuis cinq ans, Sainte-Marie-aux-Mines a aussi confié la gestion de la régie communale au privé, une tâche autrefois assurée par l’ONF, qui assure toujours ce rôle pour les bûcherons du SIVU. Mais il s’agit moins de questions économiques que de relations avec l’Office. Ainsi, la commune de Sainte-Croix-aux-Mines a fait elle aussi appel au privé depuis trois ans pour des travaux de sylviculture et d’exploitation des bois côté Hury. Il s’agissait, explique le maire, d’une façon de protester contre la suppression par l’ONF du triage du Hury et d’un des deux gardes forestiers de la commune.

Qu’en est-il de l’avenir ? A Sainte-Marie-aux-Mines, le maire assure vouloir conserver ses bûcherons, avec un complément de travail des entreprises privées locales. « C’est la solution qu’on privilégie et qu’on privilégiera. Mais il y aura sûrement des évolutions, vu que les équipes diminuent ».

Le SIVU est lui aussi amené à évoluer car s’il comptait cinq bûcherons en 2006, ils sont seulement deux actifs actuellement, avec les départs en retraite et les arrêts maladie, malheureusement nombreux dans le métier. Comme il serait trop lourd financièrement d’engager de nouveaux bûcherons, une fusion avec le SIVU de Ribeauvillé est envisagée. « Les négociations sont en cours, indique Agnès Henrichs, mais cela nécessitera l’accord des trois communes de la vallée et des 13 autres du SIVU de Ribeauvillé… »

Emilie Brotel

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